dimanche 30 décembre 2012

Le dit de l'Astrologue, fresques et peintures murales

"Le dit de l'astrologue", Château de Villeneuve-Lembron (Puy de Dôme).   
Début du XVIème siècle.
 

 
                                     Grézillé (Maine-et-Loire) Chapelle du Château de Pimpéan.
                              La décoration date de 1460-1470. Sur les voûtes, les anges porteurs des instruments de la Passion, accompagnés chacun d'inscriptions rimées composées par le Roi René. 
                             

Berzé-la-Ville (Saône-et-Loire) Eglise de l'ancien prieuré. 
Ici l'influence byzantine est très marquée.
Première moitié du XIIème siècle.

Saint-Savin-sur-Gartempe (Vienne) Eglise abbatiale.
On remarquera avec quelle élégance et quelle vigueur de style
la figure du Christ a été traitée par l'artiste.
Fin XIème - dabut XIIème siècle.


Suite à mon article sur l'Eglise Saint-Louis dont l'état est plus que préoccupant, un certain nombre d'entre vous, rencontrés en ville, m'ont demandé de parler ici des fresques et peintures murales de nos églises. C'est avec plaisir que je leur réponds aujourd'hui et les remercie encore de leur intérêt.  

Au XVIIème et XVIIIème siècles, par suite d'une réaction inhérente à la nature humaine qui va trop souvent et trop brutalement aux extrêmes, tout ce qui était médiéval eut à encourir l'opprobre de l'opinion : les jubés furent détruits, les vitraux en grand nombre furent impitoyablement brisés, mais le même traitement ne pouvait s'appliquer aux peintures murales, on se contenta de les recouvrir d'un badigeon pour les dissimuler. En fait, sans le savoir et surtout sans le vouloir, on les sauva.
Ainsi peut-on aujourd'hui se rendre compte, par le nombre de leurs découvertes, du rôle essentiel joué par la peinture murale dans la décoration des églises du Moyen-Age. Les raisons en sont faciles à déceler, le clergé poursuivait alors un double but, d'abord embellir la Maison de Dieu pour le glorifier, puis instruire les fidèles. D'ailleurs, les grands portails sculptés des cathédrales ne visaient pas à autre chose, mais alors que la sculpture demandait un travail considérable, long et coûteux, la peinture murale, art bon marché, était tout désigné pour orner les plus grands comme les plus modestes édifices.
Depuis quelques années, l'habileté des restaurateurs est telle qu'ils arrivent à isoler les différentes couches, à les enlever les unes après les autres et à retrouver puis sauvegarder les états divers qui se sont succédés au cours des âges. Le temps aidant, on peut donc espérer faire revivre au maximum cet art de la peinture murale qui durant tout le Moyen Age fut un des moyens d'expression artistique les plus populaires.
Et tout d'abord, pour le grand public, toute peinture murale est une fresque. Pas du tout. La fresque en réalité n'est qu'un procédé de peinture qui consiste à délayer dans de l'eau des terres de couleurs; celles-ci, appliquées sur une surface murale préalablement enduite d'un mortier frais, s'incorporent à ce mortier, qui, en séchant, assure à la peinture, en liaison avec elle, un support solide. Mais on imagine facilement que ce procédé rend les artistes esclaves du temps : dès que le mortier frais est appliqué sur quelques mètres carrés de surface murale, le fresquiste est dans la nécessité absolue de se mettre au travail et réaliser sa peinture dans les 24 ou 36 heures qui suivent. Sinon le mortier deviendrait trop sec et n'assumerait plus la tâche qui lui incombe ; la peinture ne s'incorporant plus à lui, verrait de ce fait sa pérennité menacée.
Pour remédier à cet inconvénient, les artistes médiévaux ont eu recours à un autre procédé : celui de la peinture à la détrempe. Au lieu de se contenter de délayer dans l'eau des terres de couleurs, comme c'est le cas pour la fresque, ils ajoutèrent un agglutinant, colle de peau, colle de poisson, oeuf ou caséine, ce qui leur permit de peindre même sur mortier sec, l'agglutinant fixant la peinture au mur. A l'époque romane, le procédé "à fresque" fut souvent employé et parfois à l'exclusion de tous les autres, mais aussi parfois en combinaison  avec le procédé "à la détrempe".
Plus on avance dans le temps, plus le procédé "à fresque" est délaissé et à partir du XIVème siècle, on peut dire que les peintres n'employèrent plus que le procédé "à la détrempe" qui les libérait d'un emploi du temps trop rigide. L'époque durant laquelle la peinture murale a brillé de son plus bel éclat fut certainement l'époque romane. Petit à petit, à l'époque gothique, cherchant les difficultés, enclins à plus de virtuosité, les artistes ombrèrent leurs peintures, juxtaposèrent les plans, amorcèrent les lointains et leurs oeuvres devinrent plus sensibles. Les siècles suivants produisirent également des merveilles surtout à la Renaissance. Ainsi au XVIème siècle, le chambellan Rigault d'Aurelle, lassé de la vie qu'il avait menée auprès des rois fit peindre des compositions humoristiques accompagnées de poèmes. Et c'est avec une philosophie résignée, qu'il nous révèle son amertume à l'égard des princes sur les murs de son château de Villeneuve-Lembron (voir première illustration) : 

"Homme vivant selon raison
Considère le temps qui court
Est plus heureux en sa maison
Que les grans qui vivent en court"

Au XIXème siècle, nombre d'églises et cathédrales furent ornées de magnifiques peintures murales comme notamment aux chapelles de Notre-Dame de Paris par Viollet-le-Duc ou à la cathédrale de Bayonne la somptueuse suite de cinquante Saints par Steinheil père, sur les indications de Boeswilwald. L'église Saint-Louis de Rochefort, n'échappa pas à la règle et il faut le redire, c'est bien dommage qu'on laisse se dégrader un si bel ensemble qui s'harmonise merveilleusement à l'édifice avec des teintes particulièrement bien choisies et rares.

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